Livre du jour : Jean-Paul Sartre : Enlevé à Altona
La langue originale: Français
Titre original: Altona a kidnappé des personnes
Traduction: Aurore Bernardez
Année de parution: 1959
Évaluation: D’accord (recommandé pour les fidèles et les diplômés)
Depuis ce malheureux jour où j’ai osé mettre un Décevant maintenant à mon cher Antonio Machado « Personne ne peut m’arrêter »comme le dit la chanson. Le grand Sartre pourrait être le prochain à mettre les élastiques.
Philosophe et écrivain ancien qui a inspiré des générations entières, il a utilisé le médium dramatique, entre autres, pour révéler des idées sur l’individu, la société ou les enjeux politiques du moment, tantôt au sens littéral, tantôt en se tournant vers l’allégorie. Et comme l’essentiel de son œuvre théâtrale se situe au milieu du siècle dernier, le poids du nazisme et des expériences de guerre est très présent. En ce moment, l’attention est concentrée Franzqui était un combattant sur le front russe, bien qu’il ait déjà tenté d’aider des Polonais à s’échapper d’un camp de concentration. L’étrange épisode vécu dans sa jeunesse n’a pas été effacé de sa mémoire, même s’il s’est révélé plus tard un ardent nazi.
Franz Il est volontairement isolé dans une pièce de la maison familiale depuis des années, et on peut dire qu’il ne semble pas très stable mentalement en ce moment, ce que sa mystérieuse sœur, qui est son seul interlocuteur, est désireuse d’aider. Malgré sa détention, Frantz Il ne peut être à l’abri des problèmes familiaux qui surviennent lorsque son riche père, homme d’affaires, lui annonce qu’il souffre d’une grave maladie.
Autant de circonstances différentes se rassemblent autour du personnage, qui forment une intrigue en apparence simple, mais qui cache plusieurs perspectives : un passé mouvementé Franzl’avenir de l’entreprise familiale, les sentiments compliqués et troubles des personnages. Sartre introduit des questions importantes sur la vie, la culpabilité, la solitude, la fidélité, puis l’argumentation, qui semblait se concentrer sur les conséquences du nazisme, se déplace dans le paysage de l’existentialisme. Les décisions non prises, ou prises pour conduire à des impasses, finissent par peser de manière décisive, même sur les personnages qui semblaient les plus aptes à affronter les carrefours de la vie.
Bien entendu, l’ouvrage n’est pas dénué d’intérêt, ce n’est pas sans raison que l’un des penseurs les plus brillants du siècle l’a écrit. On peut s’attarder plus longtemps sur la psychologie des personnages, leurs tendances cachées, leurs faiblesses. Ou blâmer la société allemande pour la montée du nazisme, ceux qui ont prospéré dans son ombre et ont tenté d’avancer dans des temps nouveaux. Nous pouvons nous plonger dans le dilemme des anciens combattants entre une Allemagne ravagée par la guerre, mais fidèle à son prétendu esprit national, et un pays qui renaît au prix du renoncement à son essence. De nombreux points pour une analyse minutieuse du champ de l’existentialisme individuel et collectif.
Mais n’oublions pas qu’il s’agit d’une pièce de théâtre, et dans cette perspective, je ne pense pas qu’elle résiste à l’analyse. Mettre tous ces ingrédients dans une fiction dialogique me semble presque imprudent. Nous sommes dans un format conçu pour que le spectateur reste attentif aux personnages pendant des heures et des heures, et que le spectateur éprouve plus ou moins de sensations pendant ce temps, il devrait se voir proposer plus que des interventions sombres avec des conflits cachés en dessous. et des réactions qui ne sont pas faciles à percevoir à la volée. Les dialogues longs, sinueux et significatifs de Sartre sont presque toujours fastidieux, si chargés et variés qu’ils sont plus déroutants que toute autre chose que l’ennui.
Peut-être que dans ce cas l’œuvre est plus adaptée à la lecture qu’à la représentation. Ou peut-être, au lieu de poursuivre la soirée de théâtre par un dîner ou quelques verres, organiser une discussion pour démêler, chacun à partir de sa propre compréhension, la multitude de choses qu’il a voulu nous dire. En tout cas, je pense que Don Juan Pablo, qui nous a laissé tant de choses intéressantes, y compris dans le format dramatique, a vécu des moments bien meilleurs.
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